Utiliser le son pour soigner

Quelle drôle d'idée !

Au Commencement était le Verbe…

Mais que fait-on de cette phrase ? Et que veut dire Verbe dans ce contexte ? Le verbe est sans doute la parole, le son de cette parole ? Consonnes mais aussi voyelles ? Est-ce que le son est primordial ? Mais alors quel son ? La parole et le chant ont toujours accompagné l’homme vers la douceur ou vers la guerre, vers l’action ou la réparation et aussi vers la santé : le tambour du « chamane » et les « icaros » du « curandero » sont encore là pour en témoigner… Mais dans ce mot : verbe on peut entendre réverbérer… le fait de renvoyer une vibration (son, lumière ou chaleur) tel l’écho. Le soigneur avec son instrument ou son chant ne ferait alors que réverbérer une vibration, une information qui vient d’ailleurs.

Pourtant, il reste difficile pour un soignant formé académiquement de raccrocher cette phrase au soin du corps et de l’âme. Aussi, quelle drôle d’idée quand on est vétérinaire devenu Ostéopathe D.O. d’utiliser le son, ce ne sont pas des choses qui se font…

Et pourtant, confronté régulièrement avec des techniques de sons qui soignent, un jour, rencontrant le chant diphonique, j’ai cru savoir ce que je pouvais en faire et je me suis lancé, difficilement au départ, pour être honnête.

Le chant diphonique

Ce chant émis depuis le ventre, trituré dans la caisse de résonance qu’est la bouche a la particularité d’émettre plusieurs sons individualisés en général deux mais aussi trois ou quatre. Le premier appelé bourdon est constant et de ce que j’en ressens au toucher, il met les cellules en vibration.

Il devient alors assez simple de trouver la fréquence qui fait résonner la zone tendue que l’on désire travailler ce qui amplifie et accélère la capacité de traitement en ostéopathie fonctionnelle. Cela se passe comme si tout à coup on utilisait une loupe tactile et sentait des menus détails jusque-là inaccessibles qu’il devient alors facile de défaire d’autant plus qu’avec la vibration certaines tensions se défont toutes seules très vite.

Le deuxième son, plus aigu, qui s’appuie sur les harmoniques du bourdon constitue une petite mélodie haute perchée et particulière. Dans ce que je comprends, elle ne fait pas vibrer les cellules, mais elle parle plutôt à ce qu’on appellerait la composante énergétique du corps ou le champ de conscience dont nous parle Bernard Dubreuil (massothérapeute à Montréal et aussi soigneur en diphonie).

Répartition du son émis en ses différentes fréquences, par un logiciel spécialisé : Overtone Analyser (de sygyt.com), plus aigu de bas en haut et plus intense du bleu au rouge.

On distingue bien le bourdon de base, rouge intense, ses harmoniques, les lignes parallèles au-dessus, et la mélodie du deuxième son sous forme de vagues rouges. Ici le troisième son tout en haut, est très peu constitué.

Chant diphonique et ostéopathie

La caisse de résonance buccale (ou nasale) est donc utilisée pour faire varier le son avec les lèvres, la langue, le voile du palais, les cavités nasales pour obtenir la vibration maximum du corps que l’on désire soigner. Rythmer le son depuis son émission est aussi quelque chose d’important.

Dans ma façon de faire, pas de recette de fréquence donnée pour tel organe, telle région du corps, tel chakra, la main qui perçoit la vibration permet de changer fréquence, type de chant, rythme jusqu’à obtenir l’effet désiré.

Même, si on constate en général que plus on est bas dans le corps et plus la résonance est grave et plus on est haut et plus elle est aiguë, que plus le tissu (os) est dense et plus la résonance est grave et plus le tissu est aérien ou liquidien (poumon, cerveau) et plus c’est aigu… c’est une règle qui n’a rien de systématique, il peut y avoir par exemple dans un os des « kystes » aigus sans que l’on puisse toujours savoir à quoi cela correspond, et dans le crâne besoin d’un son hyper grave et très rythmé.

L’avantage d’allier le son, ici le son diphonique à l’ostéopathie est donc d’amplifier les tensions qui se travaillent mieux, c’est de la physique vibratoire pure, mais l’effet immédiat est d’accélérer la consultation qui ne doit pas durer plus d’un quart d’heure tellement le remue-ménage sonore est fortement ressenti pas beaucoup de patients.

De mon point de vue, indépendamment de ce qu’on appelle la tenségrité au niveau cellulaire, qui explique comment une cellule réagit à la pression (ici sonore) il existe une raison nerveuse à cette efficacité. Dans le corps, il y a deux systèmes nerveux, le système nerveux volontaire et le système nerveux autonome qui régule les fonctions corporelles automatiques (battement de cœur, digestion, tonus musculaire).

Ce dernier se divise en orthosympathique (schématiquement accélérateur et mobilisateur des réserves) et parasympathique (schématiquement ralentisseur et récupérateur des réserves). Or le muscle n’est innervé que par l’orthosympathique, l’accélérateur… il faut pourtant bien le détendre…. et c’est le rôle des vibrations : le ronronnement du chat, le rire de l’homme, l’infrason émis par les tables dentaires des ruminants qui mâchent, etc. et dans ce système le chant diphonique et ses résonances s’insère parfaitement…

Il n’est pas rare que les patients humains descendent de la table hyper-détendus en se sentant vibrer ou avec un léger vertige. Quant aux patients animaux ils adorent ce chant, les chevaux se calment à l’écouter, les chiens viennent renifler le filet d’air qui sort de la bouche, les vaches d’un troupeau viennent voir ce qui se passe même en pleine montagne.

C’est grâce à eux que j’ai osé chanter en consultation, m’entraînant au chant accroupi contre un arbre en pleine nature en me demandant de manière lancinante quand est ce que j’allais oser le faire en public, je fermai les yeux, entendis des pas qui se rapprochaient et quand j’ai rouvert les yeux, j’avais en face, à un mètre de moi, un grand cerf mâle et toute sa ramure imposante qui me regardait droit dans les yeux… grand silence, très grande émotion… et quand après un temps long, infini, il s’en est allé au pas, j’ai compris que je tenais là un outil que je ne pouvais pas hésiter à utiliser !!!

Le rapport de ce soin chanté avec d’autres techniques sonores

Je ne peux dire pour n’avoir pas tout testé, mais utilisant la main, toute technique utilisant un instrument (bol chantant etc.) m’empêcherait d’avoir le retour de ce qui se passe. Un chant de nature différente pourrait aussi fonctionner bien sûr, mais quel que soit le son ce qui me paraît important :

  1. c’est d’avoir un moyen personnel d’évaluer l’efficacité du son émis, pour moi la main, mais j’ai rencontré des gens qui comme des chauves-souris recevaient le son en retour et à la différence savaient ce qui s’est passé, ce peut être visuel, en communication non verbale, etc.
  2. c’est d’avoir une palette de sons, de timbres, de fréquence la plus riche possible. Dernier point, ce chant est avant d’être un outil de soin, est un outil de détente et de méditation, personne ne vous empêche de l’apprendre pour votre usage personnel, aussi étranger soit-il à nos oreilles occidentales il suffit de deux jours pour faire ses premiers pas.

Exploration des fréquences de voix et instruments

En particulier, on peut essayer grâce au logiciel qui décortique les sons en ses différentes fréquences explorer différentes voix et instruments :

Voici le diagramme d’une parole : en général 2 à 5 harmoniques (Ici les 4 lignes parallèles) et une oscillation qui fait le rythme de la phrase.
Une harmonique est la réplication du son de base à une fréquence double du « son » original. Notre oreille bien qu’il y ait ici 4 notes en même temps ne perçoit qu’un seul son.

Il est possible en chantant d’utiliser une technique de chant qui favorise la création d’harmonique plus nombreuses : Le chant Harmonique.
Il y a ici une quinzaine d’harmoniques au lieu des 2 à 5. Cela donne une voix beaucoup plus chaude, style Edith Piaf ou crooner.

Et puis il y a le chant diphonique. On voit de nombreuses harmoniques aussi, mais ce qui le différencie du chant précédent, c’est la constance du bourdon, de la note de base émise. Si on en reste au bourdon, la distribution naturelle fait qu’on entend toutes les harmoniques en un seul son. Mais on peut faire une mélodie (variation rythmée des notes) en sélectionnant une harmonique préexistante et en la renforçant, ce qui permet d’entendre alors deux sons (les deux bandes rouge orangé). D’où le terme de chant diphonique.

Pour émettre un son diphonique, il y a de multiples techniques, dont plusieurs originaires de Mongolie, mais toutes utilisent les cavités naturelles (bouche, nez) et leur déformation comme caisse de résonance. Certaines techniques comme ici permettent de faire apparaître une troisième voix (harmoniques nombreuses au-delà des 3000 Hz, au-dessus de la deuxième voix, la bande rouge au tiers supérieur de la photo) qui ne s’entend en général pas mais donne au son un volume inhabituel comme si une cathédrale s’ouvrait dans le chant.

Et avec un instrument fait pour faire des harmoniques ? Voici le son fait par un « Spacedrum », un tambour harmonique.
Beaucoup d’harmoniques certes, et un son magnifique, mais des ruptures qui à chaque fois cassent la résonance quand le chant diphonique peut tel un laser emmener en cohérence sur plusieurs minutes un patient et son thérapeute.

Un autre tambour harmonique, un « Happy Drum » qui tient une résonance identique plus longtemps, mais toujours pas de deuxième voix..

Ici un bol de cristal, là, on a tout : une tenue du son de base très longue, une deuxième voix, et même la troisième…
Seul défaut pour un ostéopathe il monopolise… les mains.

Ici le bol est accompagné de chant diphonique, les deux rentrent en hétérosis, des vibrations énormes sont ressenties, il y a intensification de toutes les harmoniques, deuxième et troisième voix comprises et apparition d’une sous-harmonique. Ne l’ayant pas testé en soin, je ne sais pas ce que cela donne, mais question sensations… ça décoiffe !

On pourrait décliner ceci à l’infini… le son est un univers à lui tout seul… Et le terme de paysage sonore peut alors prendre tout son sens.
Alors, pourquoi le son lors de soins…

C’est bien beau tout cela, mais à quoi ça sert ?

Je vous ai tout à l’heure livré l’histoire du cerf… il n’a hélas pas à lui tout seul réussi à me faire chanter devant mes clients. Il a fallu que le lendemain de sa rencontre, une dame me présente son chien à consulter : un barzoï (lévrier de Sibérie), c’est un chien fin et élégant mais qui vous arrive à la taille ! Hors, les premiers mots de la dame sont : « j’ai pris rendez-vous parce qu’il a mal au dos, mais je ne sais pas pourquoi en fait car personne d’autre que moi ne peut le toucher ! » Et effectivement alors que j’approchais les mains, les 4 canines vues sur un chien aussi gros aux babines retroussées et grognant ont freiné l’ardeur de l’ostéopathe pourtant pas impressionnable que je suis.

Alors il ne restait qu’une chose à faire je me suis assis sur la table de soin et j’ai chanté… le chien est alors venu se coller contre moi, tout le temps du chant, j’ai pu le toucher, le soigner. Au moment où je pensais qu’il avait fini, il est parti et je n’ai pas pu le retoucher. Le tout devant une propriétaire interdite. Mais je n’ai pas rechanté aux consultations suivantes… Aussi quand le lendemain la dame m’a appelé au téléphone pour me dire que pour la première fois de sa vie le chien jouait avec les chats et les enfants du voisin sans les prendre pour des morceaux choisis… Alors je me suis enfin décidé à utiliser le son dans le soin.

Plus haut je vous ai livré ce que je pense être la manière d’agir du son, mais parfois la rapidité de ce qui se passe me bluffe. C’est ainsi que je fus amené à me trouver près d’un chien quand il a voulu gober une guêpe… Mauvaise idée qui lui a valu un gros œdème sur toute la lèvre. J’ai mis la main sur la partie œdématiée, et alors que je chantais, je sentais la tuméfaction diminuer sous mes doigts puis disparaître en quelques minutes !

Les effets du chant sont parfois inattendus, alors que je soignais son mal de dos, un homme s’est mis à rire sans pouvoir s’arrêter, il est parti en riant, n’a pas arrêté de rire pendant trois jours entiers… Mais le mal de dos avait aussi disparu pour ne pas revenir pendant une année.

Des exemples, il y en a tous les jours, mais le son rempli tellement l’espace que les mots ne viennent pas facilement pour expliquer et raconter… Il faut juste entendre et sentir !

Patrick Chêne
Ostéopathe D.O. Vétérinaire
Courriel : contact@patrick-chene.eu
www.vetosteopathe.eu
www.wakama-nagi.org

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