Silence et cerveau

Le silence a toujours fait l’objet de nombreuses réflexions dans l’histoire de l’être humain. Dans le même temps, les espaces dans lesquels nous évoluons sont devenus de plus en plus bruyants, et le silence devient de plus en plus difficile à trouver.

Nous sommes habitués à cette situation et nombre d’entre nous angoissent lorsqu’ils se retrouvent dans une pièce entièrement calme, car nous avons perdu l’habitude de ce genre de situations.

Notre ouïe est stimulée en permanence

Tous ces stimuli que nous recevons de notre environnement sont plus ou moins alarmants, ils ont un impact fort sur notre état d’esprit. Les pneus d’une voiture qui crissent, les musiques stridentes des magasins, les trains qui freinent dans un vacarme assourdissant…autant de petits tracas du quotidien qui nous empêchent de ressentir de la tranquillité.
“Le sable du désert est au voyageur fatigué ce que la conversation incessante est à l’amoureux du silence.” -Proverbe Perse-

Si nous pouvons tou-te-s ressentir que cela affecte notre état émotionnel, la science nous prouve également que le bruit constant affecte notre cerveau. Selon l’étude menée en Allemagne par le Research Center for Regenerative Therapies Dresden, certains processus cérébraux ne peuvent être menés que dans le silence.

Jusqu’il y a peu de temps, nous pensions que nos neurones étaient incapables de se régénérer. Cependant, avec le développement de la neurogenèse, il a été prouvé que nous faisions fausse route. Si nous n’avons pas encore déterminé tous les facteurs qui favorisent la régénération neuronale et cérébrale, il est fort possible que le silence en fasse partie.

Silence et tourisme

La science dit que le silence est beaucoup plus important pour notre cerveau que nous le pensons. En 2011, l’Office du tourisme Finnois a mené une campagne dont le « produit » marketing était le silence. En quelque sorte, ils incitent les gens à visiter la Finlande et à découvrir la beauté de cette terre silencieuse. Ils ont produit une série de photos de personnes seules dans la nature et ont utilisé le slogan « Silence, s’il-vous-plaît ». Un titre d’appel a été ajouté par Simon Anholt, un consultant en marketing international, « pas de paroles, des actions ».

Eva Kiviranta, directeur es-médias sociaux pour VisitFinland.com a déclaré : « Nous avons décidé, au lieu de dire qu’il n’y a vraiment rien et que c’est vraiment calme et que personne ne parle de rien ici, que nous allons aimer cela et en faire une chose enviable ».

Il se peut que la Finlande ait trouvé un vrai trésor. Il se peut que vous assistiez aux tout débuts de l’usage du silence comme argument de vente car le silence devient de plus en plus attrayant. Alors que le monde environnant devient de plus en plus bruyant et agité, il se peut que vous cherchiez le réconfort qu’offrent les endroits silencieux et le silence. Cela peut être une recherche pleine de sagesse car les études montrent que le silence est beaucoup plus essentiel pour votre cerveau que vous pourriez le penser.

Des cellules du cerveau régénérées pourraient juste dépendre du silence

Une étude de 2013 sur les souris publiée dans la revue Brain, Structure and Function, a utilisé différents types de bruits et de silence et ont suivi l’effet que les sons et le silence avaient sur le cerveau des souris. Le silence était censé être la référence dans l’étude mais ce qu’ils ont trouvé était surprenant. Les scientifiques ont découvert que lorsque les souris étaient exposées à deux heures de silence par jour, elles développaient de nouvelles cellules dans l’hippocampe. L’hippocampe est une région du cerveau qui est associée à la mémoire, l’émotion et l’apprentissage.

La croissance de nouvelles cellules dans le cerveau ne se traduit pas nécessairement par des effets bénéfiques tangibles sur le cerveau. Cependant, dans cet exemple, le chercheur Imke Kirste dit que les cellules en question étaient des neurones actifs.

« Nous avons vu que le silence aide réellement les nouvelles cellules générées à se différencier en neurones et à s’intégrer dans le système. » En ce sens, le silence peut littéralement faire croître votre cerveau.

Le silence aide à structurer l’information

Notre cerveau ne se repose pratiquement jamais, même lorsque nous sommes dans un état de repos profond, durant notre sommeil par exemple. Cet organe exceptionnel continue à fonctionner, mais d’une manière différente. Quand notre corps se repose, il enclenche différents processus qui viennent en complément de ceux que nous accomplissons lorsque nous sommes éveillés.

Ces processus ont pour effet de dépurer notre corps des toxines qu’il peut contenir, tant sur le plan organique que sur le plan intellectuel. Le cerveau évalue les informations et les expériences auxquelles nous avons été exposées durant toute la journée. Il va ensuite organiser et intégrer les informations les plus importantes, tout en rejetant celles qu’il juge inutiles.

Ce processus est tout à fait inconscient, mais produit des effets dont nous sommes conscients. Voilà pourquoi nous disons que “la nuit porte conseil“. Le sommeil nous permet en effet de voir les choses d’une manière différente.
Mais ce qui devient intéressant dans le cadre de notre article, c’est que le silence produit plus ou moins les mêmes effets. L’absence de stimuli auditifs agit comme une sorte de repos pour notre cerveau. Le silence, d’une manière générale, nous permet d’entrer dans une phase d’introspection et de dépurer les émotions dont nous n’avons pas besoin.

Le cerveau absorbe activement l’information et l’évalue pendant le silence

Une étude de 2001 a défini un « mode par défaut » du fonctionnement du cerveau qui montrait que même lorsque le cerveau se « reposait », il était constamment affairé à enregistrer et évaluer l’information.

La recherche de suivi a constaté que le mode par défaut est également utilisé au cours du processus d’auto-réflexion. En 2013, dans la revue Frontiers in Human Neuroscience, Joseph Moran et al, ont écrit que le mode par défaut du cerveau « s’observe le plus étroitement pendant l’activité de réflexion sur sa propre personnalité et ses caractéristiques (auto-réflexion), plutôt que durant la reconnaissance de soi, la pensée sur le concept de soi, ou l’estime de soi, par exemple. »
Quand le cerveau se repose, il est en mesure d’intégrer des informations internes et externes dans « un espace de travail conscient », ont déclaré Moran et ses collègues.

Lorsque vous n’êtes pas distrait par le bruit ou des tâches avec un but précis, il semble y avoir un moment de calme qui permet à votre espace de travail conscient un travail efficace. Pendant ces périodes de silence, votre cerveau a la liberté dont il a besoin pour découvrir sa place dans votre monde interne et externe.
Le mode par défaut vous aide à penser à des choses profondes d’une manière imaginative.
Comme Herman Melville l’a écrit : « Toutes les émotions et notions profondes sont précédées et suivies par le silence. »

Le silence soulage le stress et la tension

Il a été constaté que le bruit peut avoir un effet physique important sur notre cerveau entraînant des niveaux élevés d’hormones de stress. Les ondes sonores atteignent le cerveau sous forme de signaux électriques par l’intermédiaire de l’oreille. Le corps réagit à ces signaux, même endormi. On pense que l’amygdale (située dans le lobe temporal du cerveau) qui est associée à la formation de la mémoire et de l’émotion est activée, ce qui provoque une libération d’hormones de stress. Si vous vivez dans un environnement toujours bruyant, vous êtes susceptible d’éprouver des niveaux élevés d’hormones de stress chroniques.

Une étude qui a été publiée en 2002 dans la revue Psychological Science (Vol. 13, N° 9) a examiné les effets de la relocalisation de l’aéroport de Munich sur la santé et l’intelligence des enfants. Gary W. Evans, professeur d’écologie humaine à l’Université Cornell a remarqué que les enfants exposés au bruit développent une réaction de stress qui les pousse à ignorer le bruit. Ce qui est intéressant, c’est que ces enfants non seulement ignorent les stimuli néfastes mais ils ignorent également les stimuli auxquels ils devraient prêter attention, comme la parole.
« Cette étude est l’une des plus convaincantes et apporte probablement la preuve la plus incontestable que le bruit – même à des niveaux qui ne provoquent pas de dommages à l’audition – entraîne le stress et est nocif pour les humains », dit Evans.

Le silence semble avoir l’effet opposé sur le cerveau. Alors que le bruit peut provoquer le stress et la tension, le silence libère les tensions dans le cerveau et le corps. Une étude publiée dans la revue Heart a découvert que deux minutes de silence peut se révéler encore plus relaxant que d’écouter de la musique « relaxante ». Ils ont ont fondé ces conclusions sur des modifications qu’ils ont remarquées dans la pression artérielle et la circulation sanguine dans le cerveau.

Le silence reconstitue nos ressources cognitives

L’effet que la pollution sonore peut avoir sur la performance cognitive a été abondamment étudié. Il a été constaté que le bruit nuit à l’exécution des tâches au travail et à l’école. Il peut aussi être la cause de la diminution de la motivation et une augmentation des erreurs de décision. Les fonctions cognitives les plus fortement affectées par le bruit sont l’attention lors de la lecture, la mémoire et la résolution de problèmes.

Des études ont aussi conclu que les enfants exposés à des maisons ou des classes près des passages d’avions, de trains ou d’autoroutes ont des scores de lecture moins élevés et sont plus lents dans leur développement des compétences cognitives et linguistiques.

Mais il n’y a pas que des mauvaises nouvelles. Il est possible pour le cerveau de restaurer ses ressources cognitives. Selon la théorie de la restauration de l’attention, lorsque vous êtes dans un environnement où les agressions sonores sont moindres, le cerveau peut recouvrer une partie de ses capacités cognitives. Dans le silence, le cerveau a la capacité d’abaisser sa protection contre les agressions sensorielles et de restaurer une partie des capacités perdues du fait de l’excès de bruit.

Conclusion

Un voyage en Finlande est probablement à mettre sur votre liste des choses à faire car vous pourrez y trouver le silence dont vous avez besoin pour apaiser votre cerveau. Ou bien, si la Finlande est plutôt hors de portée pour l’instant, vous pouvez simplement faire une promenade tranquille dans un endroit paisible de votre quartier. Cela pourrait vous faire, à vous et à votre cerveau, un bien fantastique.

Jean-Paul Thouny
Thérapeute énergéticien, formateur - Voiron (Isère) France

Pour aller plus loin

Une histoire du silence : De la Renaissance à nos jours
d’Alain Corbin – B Editions Albin Michel (2016)

Le silence n’est pas la simple absence de bruit. Il réside en nous, dans cette citadelle intérieure que de grands écrivains, penseurs, savants, femmes et hommes de foi, ont cultivée durant des siècles. A l’heure où le bruit envahit tous les espaces, Alain Corbin revient sur l’histoire de cet âge où la parole était rare et précieuse. Condition du recueillement, de la rêverie, de l’oraison, le silence est le lieu intime d’où la parole émerge. Les moines ont imaginé mille techniques pour l’exalter, jusqu’aux chartreux qui vivent sans parler. Philosophes et romanciers ont dit combien la nature et le monde ne sont pas distraction vaine. Une rupture s’est produite, pourtant, aux confins des années 1950, et le silence a perdu sa valeur éducative. L’hypermédiatisation du XXIe siècle nous contraint à être partie du tout plutôt que de se tenir à l’écoute de soi, modifiant la structure même de l’individu. Redécouvrir l’école du silence, tel est l’enjeu de ce livre dont chaque citation est une invitation à la méditation, au retour sur soi. Avec ce goût pour l’insaisissable qui a donné naissance à ses plus grands livres, (Le miasme et la jonquille, Les cloches de la terre…), Alain Corbin nous invite à entendre une autre Histoire.

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